Dick Dale: Unknown Territory

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Révélé tardivement au grand public par Tarantino et le célèbre "Misirlou" (un traditionnel grec des années 40...), mais enfermé dans une image beachboyesque faussée de "père de la surf music", Dick Dale se pose surtout tranquillement comme l'un des cinq guitaristes, sinon les plus influents (on lui connaît peu de descendance), les plus novateurs du rock du siècle dernier... Trop en avance sur son temps - il fut le premier guitariste à recevoir, dans les années 50, une autorisation officielle à jouer du rock n' roll en Californie (!) -, il a tout inventé ou presque, et tout seul encore : dès 1961, ses staccatos incroyables sur fond de reverb lovecraftienne, administrés par le gaucher sur une Strat Custom or pailleté de droitier couplée à un Fender Showman, annoncent rien moins que le heavy-metal des 80's... Ça, c'est le décor pour ceux qui le confondrait avec un des frères Wilson... Et avant tout ça ? Une terrible tragédie animale, du mysticisme californien et du bouche-à-bouche...

Gentiment allumé, new-age à fond, évidemment, mégalo comme tous les génies incompris, Dale a tôt développé une passion inconditionnelle pour les animaux de toutes sortes, distribuant aujourd'hui encore à l'envi sa générosité entre divers félins (lions, ocelots, tigres), faucons, singes, chevaux et chiens... Sur la pochette d'un de ses albums, il a même osé mettre au jour un traumatisme de jeunesse des plus curieux, sans plus d'explications : "Dale was so in love with his first lion, he went into convulsions and had to be revived by artificial respiration when it died."

On a mené notre enquête, bien sûr... À l'époque, le tout jeune Dale, une vingtaine d'années, voulait devenir vétérinaire et élevait (et soignait) déjà pas mal de félins, dont Elsa, une lionne souffrant de graves déséquilibres qui la faisaient régulièrement chuter. Une nuit, très mal en point, elle voulut rentrer dans la maison du jeune Dick mais son collier s'accrocha à la chaîne qui faisait office de barrière... Elle s'y étrangla et mourut, au grand désespoir du guitariste... Encore sous le choc, il raconte sa découverte du corps : "Je la tenais dans mes bras et je lui disais 'Reviens, Elsa, reviens'. Puis y a eu un trou et je me suis vu marcher avec elle dans le soleil couchant. J'avais ma main sur ses épaules et elle me disait 'Viens, Dick, viens' et moi, je disais 'Pars pas, Elsa, pars pas' (NDLR : Elsa, on le sait, recommande également de ne pas s'en aller). Après, elle s'est dirigée vers une barrière, il faisait tout noir, la barrière s'est ouverte toute seule et je lui disais 'N'y va pas, n'y va pas' et elle me disait Viens, Dick, viens' et moi je pleurais et je lui disais 'Pars pas, s'il te plaît !'. Elle a disparu dans le noir, j'ai franchi la barrière moi aussi, j'étais dans le noir mais le talon de mon pied était toujours dans le soleil... Et puis je me suis réveillé. Mon meilleur ami était en train de me faire du bouche-à-bouche, j'avais arrêté de respirer trois fois..."

(Bonus : Allez, vous osez pas demander... Et le surf, au fait, il en fait toujours, lui qui fut longtemps un champion de la discipline, bravant les rouleaux du Pacifique du matin au soir ? "No. Water's too polluted. I almost had to have my leg amputated because of an infection. I'm going to start snowboarding.")