XTC: Another Satellite

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Ah nos mélodistes britons de XTC - pronounced "ecstasy ", hein, vous savez -, tout du groupe maudit, n'étaient de notables pointes de succès... Mené par un Andy Partridge caractériel et exubérant, ses premières influences proto-punk mises sous le boisseau, le groupe de Swindon a pondu au tournant des seventies et pendant une bonne partie des eighties quelques perles pop-rock injustement dépréciées aujourd'hui et souvent réduites aux sympatoches hit FMisants "Life Begins At The Hop" et à l'incontournable "Making Plans For Nigel"... Alors, aujourd'hui on va parler d'un (pas si) mystérieux album en marge de la riche discographie officielle du groupe et puis, bien sûr, de cette terrible nuit du 18 mars 1982, douloureuses images à l'appui...

On laisse donc de côté les disques classiques, pour certains de vrais chefs-d'oeuvre pop au risque d'insister (Drums and Wires, English Settlement, Skylark) pour se concentrer sur une production autrement marginale du groupe... Tout commence en 1982 quand le groupe, éreinté par le rythme infernal que leur imposent d'incessantes tournées, envisage, le temps d'une soirée bien arrosée, de se lancer dans un projet parallèle qui le divertirait de cette autoroute de l'Enfer dans laquelle il semble engagé... Picole aidant, "Orange Dust" et "Shaving Brush Boogie", deux titres croquignolets amenés à devenir cultes, sont enregistrés mais les choses ne vont guère plus loin... Il faut attendre deux ans pour que, à nouveau broyés par la pression de la route et, accessoirement renvoyés (!) par une chanteuse Canadienne folledingue, Mary Margret O'Hara, pour laquelle ils intervenaient en tant que producteurs, Partridge et Colin Mouldin, bassiste compositeur, relancent l'idée de sessions secrètes...

Reprenant un des premiers noms du groupe, vite abandonné, nos "The Dukes Of Stratosphear" entrent donc en studio pour enregistrer une série de six petits joyaux sixties vintage 1967 que leur nom psychédélique laissait entrevoir... The Kinks, The Move, The Beatles, le Pink Floyd barrettien, The Beach Boys, The Pretty Things, The Animals : les influences s'entrechoquent et, pour un Andy épuisé, c'est du plaisir en barre : "The Dukes were the band we all wanted to be in when we were at school. Purple, giggling, fuzztone, liquid and arriving. If you want to know where those cheap charlatans 'The Beatles', 'Pink Floyd', 'The Byrds', 'The Hollies' and 'The Beach Boys' stole their ideas from, well just listen to this and weep. "

Six titres - soit un peu léger quand même pour faire un disque complet, mais aisément de quoi lancer un EP mythique, très sixties lui aussi, d'autant que nos XTC masqués poussent la blague jusqu'à sortir la chose le 1er avril 1985, en prenant soin de ne rien révéler de leur véritable identité... Si le gag potache est vite mis au jour, beaucoup, dans les premières semaines, crurent vraiment avoir à faire avec ce 25 o'clock à un authentique disque d'époque d'un groupe de Carnaby Street, miraculeusement sauvé de l'oubli, comme l'annonçaient alors les publicités... L'ironie, rarement absente dans ce genre de contexte, voulut d'ailleurs que, alors que XTC bataillait avec Virgin sur les ventes décevantes des dernières productions du groupe, 25 O'Clock attint sans effort les 30 000 copies en Grande-Bretagne, soit le double du dernier album du groupe dans sa version officielle...

Du coup, ça s'emballa un peu dans les bureaux de Virgin : le coup du groupe mystérieux tenant du secret de polichinelle, on misa sur une sortie "officielle" d'un deuxième album, Psonic Psunspot en 1987 qui, là encore, parvint à convaincre à sa sortie 30 000 fans anglais et 60 000 aux Etats-Unis... L'heure étant décidément à la déconnade, on envisagea même de tourner un film sur ces Dukes Of Stratosphear pour Channel 4 - avec un scénario acidifié improbable : Uncle Fred, un des personnages du titre "Bike Ride To The Moon" invente une horloge de 25 heures en guise de petit objet promotionnel pour les Dukes (hmmm)... Malheureusement, les Taupes du Ministère du Temps (oui...), logées comme on l'imagine dans une espèce de palace en forme de gigantesque horloge, volent l'inestimable invention... La chasse à l'horloge est dès lors ouverte...

Convaincu de tenir là une bombe cinématographique, Partridge branche un pote, Steve Blood sur l'affaire... : "Steve Blood was a big fan of the band - we'd just brought out 25 O'Clock and he thought it would be great if we did a thing involving all the music from 25 O'Clock and a story. Not with us in it, but with a younger set of lads who looked seventeen or eighteen. They were going to make it period piece 1967, with clues to where a 25 hour clock (which was going to be made out of silver and gold) was hidden in the video. Media Lab sacked Steve before it came to light, but he had a very elaborate storyboard drawn up. They even made us sign a letter promising not to tell anyone where it was hidden, but it never came to light. »

Mais avant tout ça, curieux lecteur(s?), il y eut l'incident. Impossible que vous ayez loupé ça... On parle de Partridge ici, bien sûr et de sa gestion erratique du succès... Leader autoproclamé du groupe - en dépit de l'importance de Colin Mouldin compositeur, entre autres, des deux hits sus-nommés - Partridge sans être une bête de scène savait tenir un public jusqu'à cet inattendu revirement du 18 mars 1982, au Palace à Paris : littéralement saisi de panique, Partridge quitte la scène en plein concert...

Quand quelques semaines plus tard, apparemment rétabli, il s'évanouit sur scène, on met le tout sur le compte d'un ulcère à l'estomac avant de se rendre à l'évidence : le chanteur souffre d'une forme aiguë d'agoraphobie et désormais terrorisé à l'idée de se retrouver face à un public, fait annuler purement et simplement le reste de la tournée... Depuis, sans qu'aucune explication crédible n'ait été avancée, Partridge s'est tenu résolument éloigné de toute scène, sacrifiant seulement à quelques prestations radiophoniques... Et on a même la vidéo historique...